Rente LPP de partenaire survivant : formalisme excessif de Allianz

Une institution de prévoyance professionnelle prévoit, dans son règlement, que le ou la partenaire de vie d’un assuré retraité a droit à une rente de survivant, à la condition que cette vie commune ait été annoncée avant la date de la retraite.

Monsieur X prend sa retraite le 1er mai 2011. Dès le lendemain, il se renseigne sur ce qui se passerait pour sa partenaire, Madame Y, s’il venait à décéder. Allianz lui envoie alors un formulaire à remplir, pour annoncer cet état de concubinat, et il retourne ce formulaire le 16 mai 2011. Il décède à fin 2017. Dans un premier temps, la fondation de prévoyance Allianz verse à Madame Y une rente de partenaire survivante. Peu après, elle estime que Madame Y. n’y a pas droit et qu’elle doit restituer les prestations fournies : en effet, l’annonce de concubinat n’a pas été faite avant la date de la retraite, mais peu après celle-ci.

Madame Y ouvre leur action pour réclamer la continuation de la rente (et pour être libérée de l’obligation de rembourser).

Elle obtient gain de cause auprès du tribunal compétent du canton d’Obwald. Cette autorité fixe les dépens à hauteur de la note d’honoraires produite par son avocat, soit environ 11 800 Fr.

Mais la fondation Allianz recourt au TF (Tribunal fédéral) pour demander l’application stricte de son règlement, et à tout le moins la réduction des 11 800 Fr. qu’elle trouve excessifs. leggi di più…

Rente du deuxième pilier pour un enfant devenu majeur : qui peut l’encaisser ?

La mère invalide d’une fille née en 1993 reçoit sa pension d’invalidité de la caisse de pension Swisscanto, à laquelle s’ajoute une rente d’enfant (représentant en général 20 % de la rente de la mère). Entre les 20 et 22 ans de l’enfant, la Caisse paie la rente de cette fille, alors en formation, à la mère.

La fille fait valoir que, pour cette période où elle était majeure, la rente aurait dû lui être versée à elle, et non à sa mère. Swisscanto refuse, faute d’accord de la mère.

La fille attaque alors Swisscanto pour obtenir que la rente d’enfant majeure en formation, durant ces deux ans, lui soit versée directement. Comme c’est à tort, selon elle, que la rente d’enfant majeure d’invalide a été versée à sa mère, elle estime que Swisscanto doit payer une seconde fois à elle-même, quitte à ce que cette caisse de pensions agisse ensuite contre la mère pour tenter de récupérer la somme payée à tort à celle-ci.

Le Tribunal cantonal de Zurich lui donne raison : il faut appliquer par analogie les règles du 1er pilier (art. 71ter al. 3 RAVS), selon lesquelles la rente d’enfant majeur doit en principe être payée à l’enfant.

 Art. 71ter1Versement des rentes pour enfants2

1 Lorsque les parents de l’enfant ne sont pas ou plus mariés ou qu’ils vivent séparés, la rente pour enfant est versée sur demande au parent qui n’est pas titulaire de la rente principale si celui-ci détient l’autorité parentale sur l’enfant avec lequel il vit. Toute décision contraire du juge civil ou de l’autorité tutélaire est réservée.

2 L’al. 1 est également applicable au paiement rétroactif des rentes pour enfant. Si le parent titulaire de la rente principale s’est acquitté de son obligation d’entretien vis-à-vis de son enfant, il a droit au paiement rétroactif des rentes jusqu’à concurrence des contributions mensuelles qu’il a fournies.

3 La majorité de l’enfant ne modifie pas le mode de versement appliqué jusque-là, sauf si l’enfant majeur demande que la rente pour enfant lui soit versée directement. Toute décision contraire du juge civil ou de l’autorité tutélaire est réservée. 3

Donc Swisscanto n’aurait pas dû payer ce supplément à la mère, et doit donc payer une seconde fois à l’enfant.

Swisscanto recourt au Tribunal fédéral (TF), qui décide de rendre un arrêt de principe pour le 2ème pilier. leggi di più…

Une rente AVS, quoiqu’en principe absolument insaisissable, ne l’est pas s’il y a abus de droit.

Un homme divorcé s’était engagé à payer une pension à son ex-épouse. Parvenu à l’âge de la retraite, il  demande au tribunal une réduction sensible de cette pension. L’ex-épouse et lui parviennent à un accord sur cette réduction : la pension passe de Fr. 1800.- à Fr. 700.- par mois. N’ayant d’ailleurs pas payé ce qu’il devait par le passé, l’ex-mari se reconnaît débiteur de plus de Fr. 100 000.-, tout en déclarant n’avoir pour seul revenu qu’une rente de l’AVS. Il ne paie cependant pas la pension réduite à laquelle il s’est engagé. Poursuivi par l’ex-épouse, voit sa rente AVS être saisie. Il proteste sans succès : le Tribunal cantonal déclare que cette rente, certes en principe insaisissable, peut en l’occurrence être tout de même saisie parce que le débiteur — même s’il ne menait pas un grand train de vie — a commis un abus de droit, en mettant son troisième pilier, substantiel, à disposition de sa nouvelle épouse, qui a pu grâce à cela acquérir un appartement.

Le débiteur recourt au Tribunal fédéral (TF) leggi di più…

Douleurs persistantes après un accident à la main : l’assureur-accident peut-il stopper ses prestations, malgré un « syndrome douloureux régional complexe « (SDRC) ?

Une dame a sa main écrasée par la vitre d’un guichet d’office postal, qui s’est abaissée soudainement, le 19 mars 2015. Elle est en incapacité de travail totale durant deux mois, puis retrouve, après une brève période d’incapacité partielle, une pleine capacité au bout de quatre mois. Mais des douleurs intenses subsistent. L’assureur accident obligatoire, Groupe Mutuel, décide de mettre fin à ses prestations au 30 septembre 2015, au motif que les médecins n’ont pas décelé de séquelles. Une scintigraphie osseuse avait été pratiquée, examen classique propre à déceler éventuellement une algoneurodystrophie, appelée également « syndrome douloureux régional complexe ou SDRC» (anciennement : Sudeck). Cet examen s’était révélé négatif.

La lésée recourt au Tribunal cantonal vaudois, qui, se fondant sur une expertise judiciaire, lui donne raison : il y a bel et bien un SDRC, qui est une complication causée par l’accident et que Groupe Mutuel doit prendre en charge. Cet assureur recourt au Tribunal fédéral (TF). Entre autres arguments, il fait valoir le long délai de latence entre l’accident et le diagnostic de SDRC posé tardivement. leggi di più…

Baisse de la rente LAA par révision : quels revenus théoriques faut-il admettre ?

En 1991, Madame X, exerçant la profession de femme de ménage dans un hôtel, a un accident de ski. L’assureur LAA (Loi sur les assurances obligatoires), SWICA, lui  accorde une rente de 50 %. En 2017, une procédure de révision est engagée par cet assureur, qui estime que désormais l’invalidité s’est réduite à 26 %. Sur recours de Madame X, le Tribunal cantonal tessinois fixe le degré d’invalidité à 43 %. SWICA recourt au Tribunal fédéral (TF) en vue de faire confirmer le 26 % décidé par lui.

Devant le TF, c’est la question du revenu d’invalide qui se pose. L’assureur plaide que certes l’assurée avait été femme de chambre depuis 1976 jusqu’à l’accident de 1991, mais qu’elle avait des capacités supérieures à celles exigées pour cette profession, car elle avait ensuite travaillé comme aide-secrétaire dans une boucherie et aide-réceptionniste auprès d’un autre hôtel. De plus, elle avait fait le gymnase.

Le TF rappelle que le choix d’un tableau statistique propre à fixer le revenu exigible d’invalide (et d’ailleurs aussi de valide) est une question de droit, avec références de nombreux arrêts.

Par ailleurs, le gymnase constitue au Tessin un parcours de formation tout à fait standard et non réservé aux jeunes ayant un potentiel plus élevé.

Quant à prétendre, comme le fait l’assureur, que les activités d’aide-secrétaire et d’aide-réceptionniste sont des activités comportant « de grandes responsabilités », cela ne peut être suivi, parce que ces activités se déroulent toujours sous la surveillance d’une autre personne.

Par conséquent, le jugement cantonal doit être confirmé (rentes de 43 %) et le recours de l’assureur doit être rejeté.

ATF 8C_186/2020 du 26 juin 2020 (en italien)

Notre commentaire :

D’une manière générale, les assureurs procèdent régulièrement à des révisions dans le but de réduire les rentes, en prétendant que les assurés partiellement invalides peuvent désormais gagner davantage que ce qui avait été fixé précédemment. On fait de nouveaux calculs, alors même que l’état de santé des assurés ne s’est pas amélioré avec les années. Ici, l’assureur a tout de même pu obtenir une réduction de la rente de 50 % à 43 %, mais le TF a refusé d’aller plus loin, soit jusqu’à une réduction à 26 %. Cela aurait nécessité une modification beaucoup plus complète des bases de calcul de la rente. Une certaine forme de sécurité du droit l’a emporté et il y a lieu de s’en réjouir.

 

Assurance accident obligatoire : un diagnostic tardif peut justifier une révision

Transportant un sac de 25 kg, un ouvrier ressent tout à coup une vive douleur à l’épaule. Il continue néanmoins à travailler et ne demande pas de prestations pour incapacité de travail. L’assureur selon la Loi sur l’assurance accident obligatoire (LAA), savoir le Groupe mutuel, considère qu’il n’y a pas vraiment eu d’accident et que l’on n’est pas non plus dans le cas d’une lésion assimilée à un accident au sens de l’art.6 al. 2 LAA, car seul un diagnostic de tendinopathie a été posé, sans déchirure d’un tendon.

Une année plus tard, un diagnostic de rupture est effectivement posé grâce à une arthro-IRM. L’assuré demande alors une révision selon l’art. 53 de la Loi sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA), ce qui lui est refusé par le Groupe mutuel. Il recourt auprès du Tribunal cantonal de Genève, qui lui donne raison, obligeant cet assureur à reprendre l’instruction du cas. Mais le Groupe mutuel dépose un recours au Tribunal fédéral (TF). leggi di più…

Erreur de diagnostic : hôpital responsable aussi pour les séquelles indirectes

X, cuisinier, fait une chute le 9 octobre 2003 et se rend à la permanence Y, dont le médecin de garde diagnostique une « contusion à la hanche gauche », sans effectuer de radiographie. Le lendemain, il reprend son activité, mais les douleurs sont insupportables. Il se rend le soir même dans un autre établissement médical qui, cette fois, fait une radiographie qui révèle une fracture du col fémoral. Sur quoi des opérations sont effectuées et, trois mois plus tard, le patient reprend son travail.

Mais en août 2004, les douleurs augmentent et on diagnostique une « nécrose aseptique de la tête fémorale gauche ». Finalement, en janvier 2005, on met en place une prothèse totale de la hanche gauche, mais il subsiste des séquelles à un nerf sciatique, d’où des troubles moteurs du pied gauche et des douleurs neurogènes qui entraînent finalement une invalidité de 50 %.

X réclame des dommages et intérêts à la permanence Y. L’expert judiciaire explique en substance qu’une fracture du col fémoral doit être opérée en urgence, cela à cause de la vascularisation de la tête fémorale. Les tribunaux genevois admettent le lien de causalité entre l’invalidité actuelle et l’erreur de diagnostic commise au départ et allouent une partie des dommages et intérêts réclamés.

La permanence Y recourt au Tribunal fédéral (TF). leggi di più…

Révision d’une rente AI : une amélioration somatique entraîne-t-elle automatiquement une baisse ou une suppression d’une rente octroyée pour des raisons psychiques ?

Monsieur X, né en 1982, polymécanicien, s’est vu attribuer une rente AI depuis octobre 2008, rente confirmée en 2012.

Une nouvelle révision eut lieu en 2015, aboutissant à une suppression de rente parce que, sur le plan physique (aspect somatique) la situation s’était améliorée.

Monsieur X fait recours auprès du Tribunal cantonal de Zurich, qui lui donne raison. Mais l’Office AI dépose un recours auprès du Tribunal fédéral (TF). leggi di più…

Ouvrier écrasé sous une pile de marchandises qui s’écroule : dommages et intérêts ?

Dans une usine, une tour de 3 palettes de sacs pour l’alimentation du bétail, haute de 3 mètres et pesant 1800 kg, s’écroule tout à coup et écrase un ouvrier qui travaillait à proximité. La cause de cet écroulement demeure inconnue pour les experts mandatés ; en tout cas, il n’y a eu aucun tremblement de terre, ni du vent (on est à l’intérieur), ni une action, à ce moment-là, d’un autre ouvrier, qui aurait p.ex. ébranlé l’empilement.

La victime fait valoir sans succès, jusqu’au Tribunal fédéral (TF), qu’il reste une seule explication possible : si la pile est tombée, c’est qu’elle était instable, donc forcément mal montée. Surtout que certains témoins ont affirmé qu’il fallait toujours faire particulièrement attention, en empilant ces palettes, que la pile ne puisse pas s’écrouler.

En effet, l’Ordonnance sur la prévention des accidents (OPA) prescrit que les marchandises doivent être stockées de manière à ne pas s’écrouler. Pour la victime, l’écroulement suffit à faire la preuve que cette règle a été violée : la pile était forcément instable. En outre, comme il y a un rapport contractuel (contrat de travail entre l’ouvrier et l’employeur), la fardeau de la preuve d’une faute est inversé en droit suisse : c’est donc à l’employeur de prouver une absence de faute de sa part, preuve qui est impossible, de sorte que la responsabilité reste engagée en vertu de cette OPA, qui est elle-même la concrétisation de l’art. 328 CO obligeant l’employeur à garantir la santé des travailleurs.

Le TF rejette l’action, dans un arrêt particulièrement bref, qualifiant même la réclamation du demandeur (la victime) de … dénuée de chances de succès. Son motif est que l’ouvrier n’a pas réussi à prouver – alors que selon le TF c’était à lui de le faire – une défaut lors de l’empilement, et pas davantage une faute commise par quelqu’un de l’usine.

ATF 4A_587/2019 du 17 avril 2020

Notre commentaire :

Cet arrêt est selon nous insoutenable et même, d’une manière générale, dangereux pour la sécurité au travail, tant sont nombreux les stockages dans les usines et entrepôts.

Certes, comme juge le TF, le droit suisse ne prévoit pas, dans ce cas, une responsabilité dite objective (c’est à dire sans exigence qu’un acte illicite ait été commis ni qu’une faute soit prouvée), comme c’est le cas dans de nombreux domaines tels que p.ex. la circulation ferroviaire ou routière (un train qui déraillerait en raison d’une paille dans l’acier du rail, une voiture qui tuerait un piéton parce qu’un pneu a éclaté entraînant une déviation du véhicule).

S’il y a responsabilité objective, le lésé obtient une indemnisation simplement du fait qu’un risque objectif, prévu comme tel par le législateur, s’est réalisé.

Dans tous les autres cas, le lésé doit prouver à la fois qu’une norme objective de droit a été violée (ce que l’on appelle une «illicéité ») et qu’une faute a été commise.

Or, pour l’illicéité, c’est précisément le cas ici : la norme violée est justement celle prescrivant que des marchandises doivent être stockées de manière à ne pas tomber. De toute façon, il est impossible de prouver après coup un défaut d’empilement : une fois la pile tombée, il n’est plus possible de déterminer en quoi, exactement, cet empilement était défectueux. Autrement dit, la chute elle-même suffit bel et bien à faire la preuve de l’instabilité, donc de la violation de l’art. 41 OPA lors du montage de la pile.

Enfin, s’agissant de la faute, le TF semble avoir oublié, tout simplement, l’existence, ici, de relations contractuelles entre les parties, ayant pour conséquence de reporter le fardeau de cette preuve sur l’employeur. La solution du TF aurait été correcte si c’était un passant qui avait été victime, et non un employé, car, du fait qu’il n’y aurait dans cette hypothèse aucun rapport contractuel entre les parties, la faute n’aurait alors pas été présumée mais aurait dû être strictement prouvée par la victime.

 

Toujours les lésions à l’épaule…: quand l’assureur LAA doit-il couvrir le cas ?

 X, né en 1955, est victime, le 22 juin 2017, d’un accident de scooter, avec notamment une contusion de l’épaule droite. L’assureur LAA SUVA prend le cas en charge. Une IRM est effectuée le 2 août 2017, mettant en évidence une « déchirure transfixiante complète du tendon sus-épineux avec rétraction du moignon tendineux », cela à côté d’autres lésions à cette épaule. Une opération est nécessaire. Le médecin-conseil de la Suva indique que si on ne peut pas d’emblée rejeter le lien de causalité entre l’accident du 22 juin 2017 et les problèmes ultérieurs de l’épaule, il est toutefois clair que l’état structurel de cette épaule, révélée par l’IRM. Du 2 août 2017, ne peut pas avoir été causé par cette chute. Dès lors, la Suva refuse de prendre en charge les frais de l’opération: elle estime que le statu quo est atteint au plus tard trois mois après l’accident.

Le médecin du patient n’est pas d’accord avec cette décision. Ce litige aboutit au Tribunal cantonal vaudois, qui donne raison à l’assuré : la Suva n’a pas le droit de mettre fin à ses prestations. Celle-ci recourt alors au Tribunal fédéral (TF), demandant principalement à ce qu’elle ne doive pas prendre la suite du cas en charge, subsidiairement à ce qu’une expertise judiciaire soit ordonnée. leggi di più…

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