Pas de mesures provisionnelles comme moyen de pression financière

Un architecte a établi une note d’honoraires de plus de Fr. 1’000’000.- pour ses importants travaux. Après résiliation du mandat par le maître de l’ouvrage (MO), il réclame encore un solde sur cette note.

Ne parvenant pas à être payé, il demande au Tribunal vaudois qu’à titre de mesures provisionnelles, il soit fait interdiction au maître de l’ouvrage d’utiliser les plans.

Il obtient gain de cause en 1ère instance, mais sur appel du MO, la Cour d’appel vaudoise rejette cette requête. Il recourt au Tribunal fédéral (TF).

Cette autorité rappelle tout d’abord que le préjudice que doivent prévenir les mesures provisionnelles doit être juridique et non seulement économique. En ce sens, il restreint un peu sa jurisprudence antérieure. De plus, il doit être irréparable, en ce sens que si la justice n’accordait pas les mesures provisionnelles requises, un procès au fond n’aurait plus d’utilité.

Ici le TF écrit :

« Il y a lieu en effet d’examiner concrètement quelles sont les conséquences pour la recourante du refus d’ordonner les mesures provisionnelles qu’elle réclame. Or, il faut rappeler à cet égard que les interdictions en cause sont censées intervenir en relation avec une action en paiement des honoraires de l’architecte. L’idée de la recourante est d’empêcher les intimés d’utiliser les plans et autres documents d’architecte établis par elle tant que la facture de 1’061’569 fr.50 n’a pas été intégralement payée ou, en tout cas, tant qu’un jugement ou une transaction sur les honoraires ne sont pas intervenus. Dans cette perspective, le refus des mesures d’interdiction sollicitées a seulement pour effet de priver la recourante d’un moyen de pression sur les intimés, destiné à amener ceux-ci à payer le montant réclamé ou à transiger plus rapidement. En ce sens, la recourante subit uniquement un inconvénient de fait, qui n’a aucun rapport avec l’éventuel montant encore dû en droit sur les honoraires d’architecte. La condition du préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF n’est dès lors pas réalisée. »

La décision de la Cour d’appel vaudoise est confirmée : pas de mesures provisionnelles.

ATF 4A_421/2012, arrêt du 20 novembre 2012

Notre commentaire : L’architecte et ses avocats se sont bien rendu compte du problème lié à l’exigence du « préjudice irréparable » pour obtenir des mesures provisionnelles. Ils ont donc tenté d’argumenter habilement : si l’architecte n’était pas intégralement payé, ses droits d’auteur seraient violés ou en quelque sorte transférés gratuitement au MO. Cela n’a pas convaincu le TF, qui – à notre avis à juste titre – y a vu une simple tentative de pression économique.

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