Une caisse maladie a une créance d’environ 30 Fr. contre Monsieur X. Or, celui-ci attend depuis de nombreux mois le remboursement, par ladite caisse, de frais médicaux. Il oppose donc en compensation cette créance en remboursement, avec succès devant le tribunal cantonal de Genève. Mais la caisse maladie recourt au tribunal fédéral (TF), avec l’appui de l’Office fédéral de la santé publique.
Le TF considère que la valeur litigieuse n’est pas atteinte, mais il entre en matière car il s’agit d’une assurance sociale. Il admet le recours de la caisse maladie, au motif que les créances des caisses maladie sont assimilées à des créances de droit public, comme par exemple les impôts, de sorte qu’elles ne peuvent être compensées, cela en application de l’art. 125 ch. 3 CO. Il a déjà jugé dans ce sens (arrêt 9C_317/2019 du 24 septembre 2019 consid. 4 et les références; JEANDIN/HULLIGER, in Commentaire romand, Code des obligations I, 3 e éd. 2021, n° 10 ad art. 125 CO). La réponse à la question posée dans le titre est donc négative.
A. engage une poursuite contre B. pour environ fr. 163’000.-. B. fait opposition. A. obtient du Tribunal de district de Zurich une mainlevée partielle pour fr. 150’000.- dont à déduire 2 montants (sans doute réglés entretemps) d’environ fr. 43’000.- et fr. 29’000.-. Le poursuivi B. ouvre alors action en libération de dette et obtient gain de cause : il est jugé que la créance n’existe pas. Le poursuivi obtient en outre des dépens de fr. 3’652.- afférents à la procédure de poursuite. La poursuivante saisit le Tribunal fédéral en faisant valoir qu’elle n’a pas à payer des dépens pour la procédure de mainlevée (qu’elle avait en bonne partie gagnée). Le Tribunal fédéral entre en matière, quand bien même la valeur litigieuse n’est pas atteinte, parce que ce montant avait été fixé par un Tribunal de commerce, instance cantonale unique. Cette autorité étudie à fond la pratique jurisprudentielle et la doctrine. Dans un arrêt 123 III 220, il avait été jugé qu’il y a indépendance entre la procédure de mainlevée et l’action en libération de dette : même si l’action en libération de dette aboutit, on ne peut pas revenir sur les frais et dépens de la mainlevée, qui est donc une autre instance, indépendante. Mais certains auteurs estiment qu’il y a un lien matériel entre ces deux instances. Il serait injuste, selon une partie de cette doctrine (à laquelle le Tribunal fédéral atteste « une certaine force de conviction »), d’imposer ultérieurement des frais et dépens à la partie qui a provisoirement obtenu gain de cause dans la procédure de poursuite. Le TF confirme donc sa propre jurisprudence précitée, car le Tribunal de commerce argovien n’a pas à porter d’élément décisif en vue d’un changement de pratique. Le recours est donc admis, de sorte que le pseudo-débiteur (libéré dans l’action au fond) doit en plus les frais et dépens du Tribunal fédéral totalisant fr. 4’500.-, soit davantage que la valeur litigieuse…
Un local commercial est loué dans le canton de Vaud pour plus de 40’000.- par mois, pour une durée initiale de 5 ans (ce qui permet une clause d’indexation), bail renouvelable ensuite d’année en année. Comme d’habitude, c’est le bailleur qui a rédigé les clauses. Parmi celles-ci figure la clause suivante :
« Article 3
Le présent bail est conclu pour une durée de cinq ans, qui commence le 01/12/2017 pour finir le 30/11/2022. Toutefois le locataire aura la possibilité de résilier son bail un an après la date de début du présent bail avec un préavis de six mois avant l’échéance de celui-ci. «
En décembre 2019, le locataire résilie pour le 30 juin 2020. Le bailleur n’accepte pas cette résiliation : elle serait tardive car, pour lui, le locataire aurait dû résilier le 1er décembre 2018 (un an après le début du bail), de sorte que le locataire doit le loyer jusqu’au 1er décembre 2022. Ce 1er décembre 2018 serait le seul moment possible pour une résiliation.
Au contraire, le locataire fait valoir que la clause lui donne le droit de résilier à tout moment, une fois passée la première année de bail. Il estime ainsi ne devoir le loyer que jusqu’au 30 juin 2020.
Le Tribunal des baux donne raison au locataire, mais la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal juge en sens inverse : le loyer serait dû jusqu’au 1er décembre 2022. Le locataire recourt au TF.