Quittance pour solde de tout compte : faire attention !

 

Madame X est au bénéfice d’une assurance accidents prévoyant, en cas d’invalidité totale, un capital de Fr. 70’000.-. En 1995, elle subit une fracture du fémur lors d’un accident. Elle passe en 1997 avec l’assureur une « convention de liquidation » fixant un montant de Fr. 16’800.- pour une invalidité de 24 % (40 % de la « valeur » de la jambe qui est de 60 % du corps). Cette convention mentionne qu’elle vaut comme « indemnisation de toutes les prétentions découlant de l’assurance».

Malheureusement, il y a rechute en 2009, liée à un petit nouvel accident, et le médecin atteste que, désormais, l’invalidité représente 60 % de la jambe, soit 36 % du corps.

Madame X., cherchant à rattacher cette augmentation d’invalidité au premier accident, réclame un complément de capital de Fr. 42’000.-. Elle est déboutée en instance cantonale, mais recourt au Tribunal fédéral (TF). Elle sollicite en outre l’octroi de l’assistance judiciaire en instance fédérale.

Cette autorité est donc chargée de juger si la quittance pour solde de tout compte signée une quinzaine d’années auparavant exclut toute autre prétention, même en cas de  rechute ou de complications ultérieures. Le TF rappelle qu’une quittance pour solde couvre toutes les prétentions dont la personne assurée avait connaissance ou qu’elle pouvait tenir pour possibles. Le principe de la confiance fait que de telles quittances ont la signification que l’assureur pouvait raisonnablement en déduire. Le tribunal cantonal avait retenu, en fait, que les parties avaient bel et bien envisagé le risque d’une aggravation ultérieure. Certes, elles n’ont vraisemblablement pas envisagé que l’aggravation puisse être due partiellement à un nouvel accident, mais il n’en demeure pas moins que le risque d’aggravation était effectivement pris en compte, quelle qu’en soit la cause. Madame X fait certes valoir qu’elle n’a jamais envisagé un risque d’aggravation aussi important. Néanmoins, dès l’instant où ce risque était effectivement envisagé, aucune aggravation ne justifie la remise en cause de la transaction. Le recours étant voué à l’échec, même l’assistance judiciaire du TF est refusée.

4A_523/2017 du 21.12.2017

Notre commentaire :

D’une manière générale, les quittances pour solde sont interprétées comme n’importe quelle autre convention. Ce qui est déterminant, ce n’est ni ce que la personne a voulu dans son for intérieur, ni ce que l’on peut objectivement déduire du texte. Ce qui compte, c’est ce que le destinataire de la déclaration (en l’occurrence l’assureur) pouvait et devait raisonnablement comprendre du texte. Un assuré qui renonce à toute prétention future, alors même qu’il en a envisagé l’existence, ne peut pas revenir sur cette renonciation. Peut-il invoquer une erreur essentielle si la remise en cause de la quittance a lieu pour une circonstance nouvelle totalement inimaginable à l’époque de la signature ?. Cet aspect n’est cependant pas traité dans l’arrêt et il n’a vraisemblablement pas pu être plaidé puisque précisément le risque d’aggravation avait effectivement été envisagé par l’assurée au moment de signer la quittance. Il n’y a pas non plus erreur sur le taux de 24 %, qui résultait en l’espèce d’un avis du médecin traitant.

Signalons tout de même une mini-protection des lésés en matière de circulation routière, via l’art. 87 al. 2 LCR qui dispose : « Est annulable dans le délai d’un an à compter de sa conclusion toute convention fixant une indemnité manifestement insuffisante ». Mais puisque le délai part de la conclusion, une aggravation survenant après l’écoulement de ce délai ne permettra pas de recourir à cette disposition.

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