Un partenaire de vie n’a pas forcément droit au capital de prévoyance

Un assuré en prévoyance professionnelle, disposant d’un avoir légèrement supérieur à Fr. 60’000.-, décède en avril 2014. Sa partenaire, avec qui il vivait depuis juin 2007, réclame le paiement du capital. L’institution de prévoyance refuse : le défunt ne lui avait pas annoncé sa vie commune avec cette partenaire. Or, le règlement prévoyait :

(traduction) « Ont droit au capital en cas de décès — indépendamment du droit successoral — pour autant qu’ils aient été désignés par écrit par le défunt :

•        le conjoint survivant

•        à défaut les enfants du défunt qui donnent droit à une rente d’orphelins

•        à défaut : le partenaire survivant, pour autant qu’indépendamment du sexe, il ait vécu en ménage commun avec la personne assurée pendant au moins deux ans avant le décès …

Si personne ne remplit ces conditions, le capital reste acquis à la caisse ».

Le règlement prévoyait encore que les ayants droits devaient communiquer cette désignation écrite du défunt dans les six mois suivant le décès.

En l’espèce, il n’y avait pas de conjoint survivant ni d’enfants. Quant à la partenaire survivante, elle n’était pas au bénéfice d’une désignation écrite par le défunt.

Elle se prévalait néanmoins d’un écrit qui, à son avis, pouvait remplacer une désignation formelle pour la caisse, à savoir un testament en sa faveur.

Dès lors, la question litigieuse était de savoir si l’on pouvait considérer ou non que le testament en question équivalait à une « désignation écrite ».

Le Tribunal cantonal répondit par la négative : la partenaire survivante n’a droit à rien. Celle-ci recourt au Tribunal fédéral.

Celui-ci note tout d’abord que la partenaire ne réclame pas une rente de concubin, qui pose, elle, une condition encore plus rigoureuse, celle que la désignation soit communiquée à la caisse du vivant de l’assuré. Autrement dit, il suffit qu’une désignation existe, qui peut être communiquée à la caisse après le décès. Peu importe la forme de cette communication. L’idée, selon le TF, est qu’il peut y avoir une communauté de vie sans nécessairement que l’assuré veuille favoriser son ou sa partenaire. Certes, lorsqu’il ressort d’un testament que son auteur a voulu favoriser sa partenaire, soit en l’instituant héritière ou même héritière universelle, une telle désignation testamentaire peut suffire, mais pour autant que ce testament fasse une mention de la prévoyance professionnelle ou au moins une allusion à celle-ci. En effet, cette question est entièrement en dehors de droit successoral. En l’espèce, le testament ne parlait pas du règlement de la prévoyance professionnelle ni n’évoquait même cette question de prévoyance professionnelle. Par conséquent, la partenaire n’a pas droit au capital-décès. Le refus du tribunal cantonal doit être confirmé.

ATF 9C_284/2015 du 22.4.2016 

Notre commentaire :

Cet arrêt nous paraît bien sévère, et surtout formaliste. Il est fondé avant tout sur la prévisibilité actuarielle, pour la caisse, des prestations qu’elle fournit en cas de décès. Cet argument ne convainc pas : dès l’instant où il n’est de toute façon pas exigé que la désignation soit communiquée à la caisse du vivant de l’assuré, mais qu’il suffit que la désignation existe et qu’elle soit communiquée dans les six mois suivant le décès, la prévisibilité actuarielle en question n’est pas garantie. Ici, l’exigence posée à l’art. 20 LPP (5 ans de vie commune) était de toute façon réalisée. De plus, l’intention du défunt, telle qu’elle transparaissait du testament, était assez claire, même s’il avait omis dans ce testament de faire allusion à l’institution de prévoyance. Autrement dit, nous estimons que la solution contraire aurait pu voire dû s’imposer. La leçon de cet arrêt — alors qu’aujourd’hui les seuls avoirs de nombreuses personnes sont la caisse de prévoyance — est qu’il faut lire très attentivement les dispositions réglementaires, de manière à les respecter, si l’on veut favoriser son ou sa partenaire.

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