Chute en montagne à cause d’un malaise : accident ou non ?
Un randonneur, faisant une excursion en montagne avec des amis, déclare se sentir mal. Il a envie de vomir. Il demande à pouvoir être le dernier de la file. Tout à coup, il chute à environ 60 m en contrebas, se fait diverses lésions, surtout à la tête, et il décède peu après. Sa famille fait valoir qu’il a été victime d’un accident au sens de la loi. L’assureur accident LAA, de son côté, plaide que la cause principale du décès est une défaillance cardiaque. C’est elle qui a entraîné la chute. Lors de celle-ci, il n’y a pas eu de mouvements de protection, comme par exemple les mains placées en avant. Le tribunal cantonal vaudois donne raison à l’assureur : le décès n’est pas accidentel. La famille recourt au Tribunal fédéral (TF).
Le TF indique qu’il n’existe guère de jurisprudence récente sur l’incidence d’une cause interne (pathologique) sur un événement accidentel. Il avait été jugé (102 V 131) qu’une chute provoquée par une diminution intermittente de la pression sanguine, ayant entraîné une fracture de la jambe, est bien un accident. Une noyade due à un malaise est également un accident. En résumé, un état maladif peut être à l’origine d’un événement accidentel assuré ou en favoriser la survenance, mais il faut pour cela que l’accident comme tel apparaisse comme la cause naturelle et adéquate de l’atteinte à la santé ou du décès. Ici, il y a très peu de lésions accidentelles, qui d’ailleurs ont été insuffisantes pour entraîner le décès à elles seules, mais les médecins ont constaté des signes clairs d’une insuffisance cardiaque. Par conséquent, la décision du tribunal cantonal vaudois n’est pas critiquable. La famille n’a pas droit à une rente pour survivant.
ATF 8C_734/2015 du 18.8.2016, destiné à publication
Notre commentaire :
Cet arrêt — dont la publication est justifiée — illustre une fois de plus la difficulté, inhérente au système suisse des assurances, de distinguer entre accidents et maladies. L’enseignement qu’on peut en tirer est que lorsque l’état maladif entraîne l’accident ou du moins contribue à celui-ci, mais que cet accident à lui seul n’est pas de nature à entraîner le décès (ou les lésions), il n’y a pas de couverture d’assurance accidents. Cela est illustré par le cas de la noyade : un malaise ou une hydrocution ne sont pas en eux-mêmes capables d’entraîner un décès, mais le caractère accidentel de celui-ci (ou de lésions au cerveau du à un séjour prolongé sous l’eau) est clairement réalisé, l’être humain ne pouvant survivre sans respirer.
Ici, la couverture aurait été donnée si, lors de l’accident, la victime avait subi une fracture du crâne ou d’autres lésions mortelles. Cela dit, l’idéal serait d’avoir la même couverture pour les accidents et la maladie, les séquelles étant exactement les mêmes comme l’illustre le présent cas.