Que signifie « communauté de vie » dans un règlement de prévoyance ?

M. X. est retraité CFF depuis février 2019 et il touche une pension de vieillesse de la Caisse de pension des CFF. Il décède en février 2019. Il s’était marié peu avant son décès, le 20 décembre 2018.

La Caisse de pension des CFF estime que vu la brièveté du mariage, son épouse n’a pas droit à une rente de veuve, mais seulement à 3 rentes d’épouse totalisant fr. 137’000.-.

Mme X. est en désaccord avec cela. Certes, soutient-elle, son mariage était récent. Cependant, le règlement des CFF accordait également une rente de veuve (et non seulement une indemnité en capital) lorsque la personne avait vécu de manière ininterrompue dans une « communauté de vie » au moins durant 5 ans avant le décès.

La question litigieuse était celle-ci : peut-on ajouter la durée de la communauté de vie à la durée du mariage ? Si oui, il y a droit à une rente de veuve si l’on dépasse les 5 ans. Sinon, c’est la position de la Caisse de pension des CFF qui l’emporte.

Le Tribunal cantonal de Berne donne raison à la Caisse de pension des CFF. L’assurée fait recours au Tribunal fédéral.

Cette autorité examine donc s’il y a lieu d’ajouter ou non la durée de la communauté de vie à la durée du ménage commun après le mariage. Pour la veuve, il peut y avoir « communauté de vie » sans ménage commun avec adresse commune. Le Tribunal fédéral constate tout d’abord qu’à un autre endroit du règlement, on trouve l’expression (traduction) « communauté de vie avec ménage commun ». Autrement dit, il pourrait y avoir une communauté de vie sans ménage commun (cons. 4.3.3). De plus, en l’espèce, M. et Mme X. se connaissaient depuis 1999. M. X. soutenait financièrement sa femme. Il l’aidait dans le paiement de son loyer. Il voulait d’ailleurs déjà emménager à un domicile commun en 2013, mais cela n’a été possible qu’à partir du 1er avril 2014 parce que le locataire précédent n’avait pas quitté l’appartement. En considérant à la fois les liens affectifs très forts, les aides financières de M. X. à Mme X., la prise d’un domicile commun puis le mariage, on doit considérer qu’il existait depuis plus de 5 ans une véritable « communauté de vie » entre les époux, de sorte que Mme X. a bien droit à une rente de veuve et non seulement à une indemnité en capital, cela avec un intérêt de retard de 5% selon l’ATF 145 V 18 cons. 4.2. Son recours est ainsi admis.

ATF 9C_655/2021 du 03.02.2023

Notre commentaire :

Cet arrêt doit être approuvé. C’est à juste titre que le Tribunal fédéral a admis qu’une clause peu claire d’un règlement, en l’occurrence le règlement de la Caisse de pension des CFF quant à la notion de « communauté de vie », doit être interprété en défaveur de son auteur.

Il est toutefois préférable de signaler le plus tôt possible à la Caisse de pension qu’il y a désormais vie commune de 2 personnes non mariées. En effet, les couples non mariés, qui sont nombreux, oublient fréquemment cette démarche. Et tous les règlements des Caisses de pension ne parlent pas nécessairement de l’exigence d’une « communauté de vie », mais se bornent à accorder des prestations de veuf ou de veuve en cas de « domicile commun ». Il convient donc de bien lire le règlement et de rédiger la déclaration de la manière la plus adéquate possible, du genre :

« Dès la date x……, nous formons une communauté de vie.

Dès la date y ……., nous avons un domicile commun à l’adresse suivante : ………. ».

Ces précisions devraient éviter la nécessité de prouver la communauté de vie par divers documents, tels que les lieux où l’on a pris des vacances en commun, les aides financières de l’un à l’autre, les amis témoignant d’une telle communauté, etc. etc.

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