Indemnités journalières LCA : un assureur privé peut-il tenir compte d’une rente AI hypothétique ?

Mme X est  assurée par la collective de son employeur pour 720 indemnités journalières maximum. Les CGA indiquent en substance que ces indemnités complètent les rentes AI auxquelles l’assuré a droit. Or, Mme X n’a pas déposé une demande de rente AI. Pourquoi ?  Parce que l’assurance ne lui a pas demandé de le faire, parce qu’elle ignorait même peut-être y avoir droit, parce que vu son jeune âge elle ne pensait pas devenir invalide, mais espérait au contraire récupérer sa capacité de gain. L’assureur veut néanmoins  réduire l’ indemnité journalière de la rente hypothétique (ou théorique) que Mme X aurait pu recevoir si elle avait fait les démarches adéquates. Il suffit en effet, selon l’assureur, qu’elle y ait droit ; peu importe qu’elle fasse effectivement valoir ou non ce droit, donc peu importe qu’elle reçoive ou non la rente AI. Dans tous les cas, une rente AI hypothétique doit être déduite. En première et seconde instance vaudoises,  la thèse de l’assureur est rejetée. Il recourt au TF.

L’assureur fait valoir en substance au TF que l’assurée, en ne déposant pas de demande AI, a en quelque sorte renoncé abusivement à un droit, pour porter préjudice à cet assureur, qui devrait de ce fait payer intégralement l’indemnité journalière.

Pour déterminer le sens exact de la clause, permettant une réduction lorsque l’assuré « a droit » à une rente AI, il faut se demander ce que signifie objectivement (s’agissant d’interpréter des CGA) cette expression. Pour le TF, il faut « au moins que le droit soit reconnu par l’organe compétent ». Ce qui n’était évidemment pas réalisé ici, faute d’une demande AI ! Et vu les circonstances, on ne peut pas dire que le fait, pour l’assurée, de n’avoir pas demandé l’AI ait été abusif.

L’assureur plaidait aussi, sur la base de l’ATF 133 III 527,  que l’assurée, en s’abstenant de demander l’AI, avait, de mauvaise foi,  empêché une condition (art. 156 CO) de survenir (savoir : l’octroi d’une rente AI). Dès lors, la condition était réputée survenue, en vertu de cette disposition légale. Le TF nie cependant que le cas soit identique à celui de l’ATF en question, où l’assuré avait été sommé de demander  l’AI et s’y était refusé sans raison sérieuse, probablement pour nuire à l’assureur. Ici l’assurée ne savait pas qu’elle auraitt éventuellement droit à une rente AI, et personne ne l’avait sommée de déposer une telle demande.  Le recours de l’assureur est rejeté.

ATF 4A_561/2012 du 23 janvier 2013

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