Intervention chirurgicale qui tourne mal : « accident » selon la LAA ou non ?

A., née en 1949, assurée en LAA auprès de la SUVA, doit subir en 2011 une opération au cœur. Lors de celle-ci, une petite perforation de l’artère coronaire a lieu, qui n’est pas remarquée immédiatement. A. décède six heures après l’opération. La SUVA conteste qu’il y ait « accident » au sens de la loi et refuse ses prestations. Son veuf recourt au TC (SG), qui lui donne raison. Refusant cette solution, la SUVA recourt au TF.

Cette autorité rappelle d’abord la définition légale de l’accident, selon l’art. 4 LPGA :

« Est réputé accident toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort. »

Tout le litige porte sur le caractère extraordinaire (les autres critères – dommage, soudaineté, caractère involontaire – sont manifestement remplis). Le TF juge qu’une erreur médicale, au sens du droit de la responsabilité civile, n’est pas nécessaire. Mais il faut quand même qu’une faute grave ait été commise lors de l’intervention. Or, tel n’était pas le cas en l’espèce. L’opération avait été faite correctement et ce genre de perforation, quoique rare ( env. 0,9 %),  peut arriver malgré toutes les précautions prises. C’est un risque rare qui s’est malheureusement réalisé. Le recours de la SUVA doit donc être admis.

ATF 8C_283/2014 du 2 septembre 2014

Notre commentaire : 

Cet arrêt est sévère, et la solution inverse aurait tout aussi bien pu se justifier (ce qu’avait admis le Tribunal cantonal de St-Gall). En exigeant une faute « grave » des chirurgiens, le TF pose un critère qui n’a pas de base légale. En LAA en effet, même les accidents causés par une négligence « simple » (légère ou moyenne) sont couverts. A notre avis d’ailleurs, le TF se contredit : si cet accident n’arrive que dans 0,9 %  des opérations de ce type, c’est justement la démonstration qu’ils sont « extraordinaires » au sens de la loi.  Il n’est bien évidemment pas question de faire couvrir par l’assurance-accidents toutes les séquelles d’opérations ou d’actes médicaux qui sont infructueux voire entraînent une invalidité. Toutefois, le décès du patient est une conséquence d’ultime gravité, et de ce fait déjà, le caractère extraordinaire – car une opération n’est pas censée conduire au décès –  devrait être apprécié assez largement.

Ajoutons – l’arrêt ne traite pas de cela – que ce faible pourcentage paraît de surcroît exclure une action civile en responsabilité médicale, même pour information insuffisante du patient (absence de consentement éclairé) : car un risque de 0,9% ne doit pas obligatoirement être communiqué au patient.

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