Courrier A+ : point de départ d’un délai

M. A. fait l’objet d’un retrait du permis de conduire pour une durée de 8 mois, selon décision envoyée par l’administration, par courrier A+ déposé dans sa boîte aux lettres, à l’entrée de l’immeuble où il est domicilié, le 17 avril 2019. Il conduit néanmoins le 31 octobre 2019, ce qui entraîne une condamnation, qui aboutit au Tribunal fédéral; et devant cette autorité il fait valoir que la notification du retrait de permis de conduire du 11 avril 2019 était irrégulière.

Le TF rappelle que « selon une jurisprudence bien établie, les communications des autorités sont soumises au principe de la réception. Il suffit qu’elles soient placées dans la sphère de puissance de leur destinataire et que celui-ci soit à même d’en prendre connaissance (arrêt 6B_192/2021 du 27.09.2021 et références citées) ». Le TF ajoute : « il n’est donc pas nécessaire que le destinataire ait personnellement en mains la décision en cause, encore moins qu’il en prenne effectivement connaissance (ATF 142 III 599, cons. 2.4.1; 109 Ia 15 cons. 4) ». Il ajoute que l’envoi d’une décision par courrier A+ est admis par lui-même. On présume, pour un tel courrier A+, qu’il a été dûment déposé dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire et que la date de distribution a été correctement enregistrée par l’informatique. C’est donc au destinataire, par renversement du fardeau de la preuve, de prouver qu’il ne l’a pas reçu à la date indiquée. Comme c’est une preuve négative, il faut pratiquement établir la vraisemblance d’une erreur de la poste (ATF 142 IV 201 et divers arrêts). En l’espèce, le suivi « Track & Trace » indiquait bel et bien une distribution dans la boîte aux lettres de A. en date du 17 avril 2019.

A l’encontre de cela, il faudrait des indices concrets que, d’une manière générale, les erreurs de distribution sont commises par la poste. Or, A. n’a pas prétendu avoir eu personnellement des soucis de distribution de ses courriers ou avoir été victime d’une erreur de la poste par le passé, ni que des problèmes se seraient présentés de manière récurrente dans son immeuble ou dans son quartier. D’ailleurs, par le passé, le recourant avait été négligent dans le retrait de divers actes judiciaires. Il n’était donc pas arbitraire, de la part du Tribunal cantonal fribourgeois, de retenir que ces quelques éléments avancés par A. ne constituaient pas des indices concrets propres à renverser la présomption de distribution découlant du relevé « Track & Trace ».

Le recourant a également dû assumer fr. 3’000.- de frais auprès du Tribunal fédéral.

ATF 6B_794/2022 du 21.04.2023

Notre commentaire :

Le système des envois « A+ » est relativement redoutable. D’une part, s’il s’absente pour quelques jours, le destinataire ne peut pas savoir à quelle date exactement la lettre a été remise dans sa boîte aux lettres sauf à procéder à des recherches « Track and Trace », qui d’ailleurs ne sont pas toujours fructueuses, vu que le numéro permettant la recherche ne figure pas nécessairement sur l’envoi. Cependant, et en tout cas lorsqu’il doit s’attendre à recevoir une communication officielle, il doit prendre certaines précautions, par exemple d’annoncer à l’autorité qui doit émettre cette communication qu’il sera absent jusqu’à une date déterminée. A certaines conditions, il peut aussi demander à la poste de garder le courrier pendant quelques jours. Ce caractère redoutable des envois A+ (au contraire du système des envois recommandés) vaut non seulement pour le point de départ des délais, mais aussi, comme en l’espèce, pour le cas où une action (conduite d’un véhicule) a eu lieu après la réception d’un acte qui l’interdisait.

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